La programmation de cette nouvelle édition a été riche en rencontres et en sensations fortes. Retour sur cinq jours de frayeur dans la Perle des Vosges.

Il y a une semaine très exactement, le 32ème Festival International du Film Fantastique de Gérardmer était sur le point de commencer pour le plus grand plaisir des amateurs de cinéma fantastique et d'horreur. Cinq jours intenses de festivités qui sont passés (beaucoup) trop rapidement où les festivaliers ont pu profiter de projections mais aussi de conférences, d'expositions et de nombreuses animations en ville.
Voici le bilan de votre humble rédactrice pour cette édition 2025 qui s'est donc déroulée du 29 janvier au 02 février.
Mercredi 29 janvier
Avant d'entrer dans le vif du sujet avec la cérémonie d'ouverture et la projection du premier film de cette année, c'était le traditionnel passage par l'Espace Tilleul pour récupérer un catalogue et découvrir l'exposition "Monstres : les visages universels de la peur" à la Médiathèque.
Consacrée plus spécifiquement à la série de films "Universal Monsters", qui désigne des œuvres issues du fantastique, de l'horreur et de la science-fiction produites par Universal Pictures entre 1923 et 1960, elle permet de (re)découvrir les grandes figures du cinéma horrifique avec de magnifiques reproductions d'affiches et d'images.
Pour information, l'exposition est visible gratuitement jusqu'au 24 février.
Après avoir visité cette exposition, il était temps de se rendre à l'Espace Lac pour la cérémonie d'ouverture. En arrivant environ une heure avant le début de la cérémonie, il n'y a eu aucun soucis pour entrer et il restait encore plusieurs places libres donc si n'hésitez pas à venir faire la queue dans la file sans réservation l'année prochaine si vous voulez vivre en direct le début du festival.
La cérémonie a débuté par une ouverture de rideau pour rendre hommage au réalisateur David Lynch décédée il y a trois semaines avant de laisser place aux fameux discours protocolaires. L'un des temps forts a été le passage de flambeau émouvant entre Pierre Sachot, président de l'association du Festival pendant plus de 30 ans, et Anne Villemin, qui prend la relève.
Le Jury longs-métrages de cette 32ème édition, présidé par Vimala Pons et composé de Clotilde Hesme, William Lebghil, Vladimir Cauchemar, Jérémy Clapin, Caroline Poggie et Jonathan Vinel, est ensuite arrivé sur scène avant de se rendre dans la salle parmi les festivaliers pour découvrir Companion, un film d'ouverture plaisant qu'il est très fortement conseillé de découvrir sans avoir rien lu ni vu autour de celui-ci.

Jeudi 30 janvier
Une deuxième journée chargée avec quatre films au programme qui a commencé avec la projection du premier long-métrage en compétition, Grafted de la réalisatrice néo-zélandaise Sasha Rainbow et quelle mise en bouche ! Du body horror dans la veine de The Substance qui mérite le détour malgré une héroïne qui bascule un peu trop vite dans une folie meurtrière.
L'après-midi était dédié à deux films hors compétition qui se sont avérés décevants. Le premier était She Loved Blossoms More, projeté en présence du réalisateur Yannis Veslemes et de l'acteur Dominique Pinon, qui a confié qu'il allait découvrir pour la première fois le film. Il faut bien avouer qu'on aimerait connaître son avis à propos de cette coproduction franco-grecque où se mêlent constamment drogue et sexe avec des plans peu subtiles et aussi un affreux animatronique qu'on croirait tout droit sorti dans parc d'attractions abandonné. Reste cependant une assez belle esthétique par moments et quelques effets visuels réussis mais c'est tout pour ce délire qui ne m'a pas emportée.

Etant donné qu'il y avait un peu de temps entre les séances, c'était l'occasion d'aller au vernissage de l'exposition Arts Plastiques à la Villa Monplaisir située juste à côté de l'Espace Lac.
On pouvait y découvrir des univers variés, allant des tableaux abstraits de la peintre Françoise Andrès aux dessins hyperréalistes au stylo bic de Teddy Bellino en passant par un voyage intergalactique avec les œuvres de Hervé Cadiou. Il était également possible d'y découvrir le travail de l'illustrateur Grégory Lê qui a conçu des affiches alternatives de films pour les éditions vidéos Le Chat qui fume, les peintures oniriques de Sébastien Féry-Voignier ou encore les illustrations en noir et blanc de Kévin Marzal alias Shadow Side Seeing.
17h. Il était maintenant temps de se diriger vers le Casino pour la troisième séance de la journée, Last Stop: Rocafort Station. Cliché, basique, avec des jumpscares poussifs et une révélation qui n'en est pas une étant donné qu'on devine assez vite ce qu'il en est, ce film a tout pour nous endormir. Avec une intrigue se déroulant en grande partie dans les stations de métro de Barcelone, il y avait de quoi faire pour créer des moments de tension et de peur, malheureusement il n'en est rien.
Après cette presque sieste, retour à l'Espace Lac pour le dernier film de la journée, Oddity de Damian McCarthy, un gros coup de cœur qui a aurait amplement mérité de gagner plus que le seul Prix du public. C'est un grand film d'épouvante, avec des scènes de tension redoutablement efficaces et des personnages qu'on n'est pas prêts d'oublier de sitôt, à l'image du personnage au masque blanc (oui, j'en parle encore et je ne cesserai jamais d'en parler dès lors que j'évoquerait ce film tant il m'a effrayée).

Vendredi 31 janvier
Ce sont également quatre films qui ont été vus lors de ce troisième jour de festival, en commençant par Rumours, qui a obtenu le Prix du Jury ex-aequo. S'il a su convaincre le jury, cela n'a pas été mon cas. Versant dans l'absurde allant surtout vers le grotesque avec des Bog - des sortes de momies ou zombies - qui ont des gestes surprenants qui ne seront pas dévoilés ici mais qu'il faut pouvoir prendre au dixième degré pour trouver ça drôle et non affligeant. Ce film montre juste à quel point les dirigeants politiques ont du mal à gérer des situations de crise mais était-ce vraiment nécessaire ? C'est dommage car il y a de bonnes idées, comme un cerveau géant, mais qui ne seront jamais véritablement exploités.
En début d'après-midi, à 14h30 très précisément, c'était rendez-vous à la Médiathèque pour la conférence "Les fantômes au féminin à travers les âges et ce qu’ils disent de notre rapport à la féminité" avec le collectif La S'Horrorité.
Jessica, du blog « Bon Chic Bon Genre », Judith de la chaîne « Demoiselles d’Horreur » et journaliste à Écran Large, Jess, critique à « Fucking Cinéphiles » et de la chaîne « Jess Slash’her », Eléonore, critique à « Fucking Cinéphiles » et du blog « Léo Iurillo » et Mylène de la chaîne « Welcome to Primetime Bitch! » et du podcast « Jumpscare » ont évoqué plusieurs figures de fantômes, allant de la littérature gothique aux fantômes japonais tout en passant par les expérimentations des débuts du cinéma, les déclinaisons de maisons hantées ainsi que les esprits dans le cinéma hongkongais.
Une conférence riche, avec de nombreuses références qui ont ajouté des films à ma watchlist, qui a fait l'objet d'une captation et devrait donc être prochainement disponible sur la chaîne YouTube du Festival.
La journée s'est poursuivie avec la projection du film hors compétition In Vitro, un film australien à propos du clonage. L'idée de départ est intéressante mais le rythme lent et l'exécution classique sans trop de surprises ne parviennent pas à garder notre attention.
À ce moment-là, c'était une journée plutôt mitigée au niveau des films et ça a continué avec Les Maudites (The Wailing), présenté en compétition en présence du réalisateur Pedro Martín-Calero, qui est reparti avec le prix du Jury Jeunes et le Prix de la Critique. Le début de séance s'est fait dans la joie et la bonne humeur avec comme toujours des applaudissements nourris et des acclamations à chaque apparition des logos des sociétés et institutions ayant contribué au financement du film, sauf que cette fois-ci, un record a dû être atteint avec environ une vingtaine de logos présentés. Après quoi, le long-métrage démarre avec une scène en boîte avec de nombreux effets de lumières déconseillée aux personnes photosensibles et épileptiques (soulignons le fait qu'il y a un avertissement concernant cette scène juste avant le début du film, fait rare et ce serait bien que l'équipe du festival fasse de même dans le guide pratique). L'histoire se poursuit avec une première partie intrigante avant de s'essouffler et de s'empêtrer dans des longueurs. En tant que court-métrage, le film aurait été parfait, en long il est justement trop long.


Dernière séance de la journée à 22h avec Azrael, un film muet avec une ambiance particulière et saisissante. Certes ça manque un peu de contexte mais ça intrigue fortement, d'autant plus lorsque l'on découvre le nom des différents personnages dans le générique de fin et que certains éléments font alors encore plus sens. Voir Samara Weaving en mode survival ça fait toujours plaisir avec des scènes d'action prenantes et tranchantes. Un pur régal qui est certainement plus un plaisir coupable qu'autre chose mais c'est indéniablement une oeuvre originale.
Samedi 1er février
Gérardmer, quatrième jour. Le soleil est au rendez-vous, tout comme le froid et, comme le dit l'expression, jamais deux sans trois, donc ça repart sur une journée avec quatre séances.
Cela débute avec le rattrapage du film de Chris Nash In a Violent Nature, vainqueur du Grand Prix de cette 32ème édition, un slasher certes original dans son approche mais qui est d'un ennui mortel. C'est lent, les personnages sont tous plus stupides les uns que les autres et le scroutch-scroutch des pas du tueur sur le sol forestier est insupportable. Seule une scène de meurtre très graphique réveille un peu mais ça reste mollasson dans l'ensemble.
Comme il y a du temps avant la prochaine séance, direction la Médiathèque pour la rencontre « Quand le cinéma d’horreur inspire les romanciers » animée par Baptiste Liger et avec Cédric Sire, présentant son nouveau livre Survivantes, et Jean-Baptiste Del Amo, qui a évoqué son roman sortant en mars La nuit ravagée.
C'était un moment d'échange passionnant qui m'a donné envie de plonger dans l'univers de ces deux auteurs, notamment celui de Cédric Sire dès lors qu'il a parlé de l'influence profonde du slasher et de la figure de la final girl pour son dernier roman. J'ai donc profité de l'occasion pour me procurer son livre au Grimoire avec une dédicace au passage et ce n'était pas la dernière de la journée.
En effet, j'ai également acheté Le Présentateur, le livre de David Rault, alias Fido, présentateur emblématique du Festival de Gérardmer mais aussi d'autres festivals tels que celui de Deauville ou Reims Polar. De retour à l'Espace Lac pour la projection du film français en compétition Else, j'aperçois David et la magie du festival opère. Il prend le temps de me faire une belle petite dédicace personnalisée et ce bref instant fait de cette 32ème édition un moment inoubliable.
Vient le moment de la projection du film Else de Thibault Emin, qui était accompagné de l'acteur principal Matthieu Sampeur et de son producteur Damien Lagogué. Proposition de cinéma intrigante aux allures poétiques, Else est une oeuvre singulière, étrange, déroutante, avec des effets pratiques et visuels réussis. Même si n'est pas le genre de film que j'apprécie le plus en raison d'une certaine lenteur et qu'il y aurait pu avoir plus d'explications quant à la raison de la fusion des corps avec les choses, c'est une proposition remarquable.

Pas le temps de se reposer entre les séances, il est déjà l'heure d'assister à la soirée hommage à Ti West, qui a d'ailleurs donné un masterclass en début d'après-midi. Après la diffusion de quelques extraits de ses films, le réalisateur, scénariste et producteur est monté sur scène pour récupérer son prix d'honneur.
La soirée s'est poursuivie avec la projection de l'avant-dernier film en compétition, La Fièvre de l'argent, en présence du réalisateur Galder Gaztelu-Urrutia, un long-métrage dans lequel les personnes riches sont touchées par un mystérieux virus. C'était pas mal même si on aurait pu penser que ça allait partir plus loin dans le côté trash. C'est un film qui se laisse regarder même si c'est un peu confus par moments et que ça manque de scènes de chaos en pleine ville.

22h. Dernière séance de la journée et il s'agit de Presence, le nouveau film de Steven Soderbergh au concept intéressant et qui réinvente de manière originale la maison hantée. Là aussi il faut se laisser porter et éviter de trop en lire sur le film pour profiter de l'expérience au maximum. Il est à découvrir dès maintenant dans les salles de cinéma.
Dimanche 02 février
Cinquième et ultime jour de cette 32ème édition. Le temps est passé si vite et me voilà déjà à 10h30 à la projection de Exhuma, dernier film en compétition. Ce long-métrage du sud-coréen Jang Jae-hyun présente plusieurs figures de fantômes (le protecteur, le vengeur, le guerrier...) issus de différentes cultures, en l'occurrence les cultures coréenne et japonaise et embarque le spectateur dans une histoire rythmée, avec une bonne bande originale et de l'action. Une bonne surprise et un Prix du Jury ex-aequo amplement mérité.
Les abords du lac resplendissent sous le soleil vosgien et j'en profite donc faire quelques photos (ne faites pas attention aux canards, il s'agit d'une private joke).
L'après-midi, c'était rendez-vous à la Maison de la Culture et des Loisirs (MCL) pour la table ronde "L'art des effets spéciaux au cœur du fantastique" dans le cadre des Rencontres Fantastiques du festival. Il y a un peu de temps avant la rencontre donc petit tour à l'étage pour découvrir l'exposition bande dessinée autour des tomes 1 et 2 de Noir Horizon de Benjamin Blasco-Martinez et Philippe Pelaez.
14h30, la table ronde commence. Animée par Yann Marchet, délégué général France VFX, elle a réuni Emma Benestan, scénariste & réalisatrice du film Animale, Daniel Weimer, associé & responsable artistique chez Accurate Dream, Thibault Emin, scénariste & réalisateur du film Else, Arnaud Leviez, superviseur VFX chez Digital District et Romain Toumi, superviseur effets visuels et réalisateur chez Fensch Toast.
Entre secrets de fabrication, discussions autour de la relation entre les départements effets pratiques et effets visuels, et réflexion sur l'avenir des effets spéciaux, il s'agissait là aussi d'une rencontre passionnante qui a également fait l'objet d'une captation et qui sera elle aussi probablement mise en ligne sur la chaîne YouTube du festival dans quelques semaines.
Le soleil commence à décliner peu à peu. C'est l'heure d'aller patienter pour la cérémonie de clôture environ deux heures avant qu'elle ne commence. A partir de 18h30, le froid commence à se faire sentir, les chanceux ayant une invitation arrivent mais ils sont étonnement peu nombreux. Environ dix minutes plus tard nous pouvons enfin entrer dans la salle qui ne sera pas trop remplie pour la clôture - donc si vous voulez la vivre en live, n'hésitez pas l'année prochaine à patienter dans la file car l'entrée se fait facilement.
Histoire de finir en beauté, certains sièges qui étaient réservés aux invités au milieu, juste derrière le jury, sont finalement libres et c'est donc aux premières loges que j'assiste à la cérémonie de clôture, qui commence avec quelques discours avant de passer au vif du sujet. Voici à nouveau le palmarès, déjà évoqué dans les lignes précédentes :
Prix du Public : Oddity de Damian McCarthy
Prix du Jury Jeunes : Les Maudites de Pedro Martín-Calero
Prix de la Critique : Les Maudites de Pedro Martín-Calero
Prix du Jury ex-aequo : Exhuma de Jang Jae-hyun et Rumours de Guy Maddin, Evan Johnson & Galen Johnson
Grand Prix : In a Violent Nature de Chris Nash
Sans oublier le Prix du court-métrage attribué à Hakim Atoui pour son film Les Liens du sang.
Il est étonnant de voir In a Violent Nature, considéré comme l'un des pires films de cette édition, recevoir le prix le plus prestigieux du festival, tout comme Rumours qui a beaucoup divisé. Certes Les Maudites ne met pas tout le monde d'accord mais il possède quelques scènes efficaces et son concept dans l'esprit de It Follows peuvent justifier les prix qu'il a reçu.
La soirée s'est achevée avec la projection du film de clôture, Please Don't Feed the Children, premier long-métrage de Destry Allyn Spielberg qui a lui aussi divisé mais qui est prometteur quant à la suite pour sa réalisatrice. Son ambiance pesante et le personnage ambigu de la femme en font un thriller dystopique prenant qui a permis de terminer le festival sur une note positive.
En bref, cela donne donc :
15 films vus
3 conférences
2 rencontres / dédicaces
Un vernissage avec l'exposition Arts Plastiques
Découverte des expositions bande dessinée et "Monstres : les visages universels de la peur
Le rendez-vous est pris pour l'année prochaine, avec une 33ème édition qui se déroulera du mardi 27 janvier au dimanche 1er février 2026 soit un jour de plus de frissons et d'émotions. À l'année prochaine !
P.S : Au moment de l'écriture de ces lignes, les critiques des films Please Don't Feed the Children, Les Maudites et La Fièvre de l'argent sont encore en cours de rédaction et les liens vers lesdites critiques seront donc ajoutées plus tard à cet article.
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