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The Substance [CRITIQUE]

Photo du rédacteur: La CinéphileLa Cinéphile

Après avoir abordé le sous-genre du rape and revenge dans Revenge, la scénariste et réalisatrice Coralie Fargeat s'attaque au body horror avec The Substance, un deuxième long-métrage qui s'impose comme l'un des meilleurs films de l'année.

affiche française du film The Substance

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Le cinéma de genre français est-il enfin en train d'avoir la reconnaissance qu'il mérite ? Prix du meilleur scénario au dernier Festival de Cannes, The Substance est une véritable curiosité cinématographique où gore et grotesque s'unissent dans un film résolument féministe.


Coralie Fargeat se saisit du male gaze pour mieux le critiquer et interroger le rapport au corps féminin dans les sociétés, en particulier au travers de la scène "Pump it up" au style clip assumé où la caméra est au plus près du corps de l'héroïne. Mais l'aspect répugnant de cette partie de la gent masculine représentée dans ce film par Harvey, producteur avide de "chair fraîche" impeccablement incarné par Dennis Quaid, est aussi illustrée à travers des gros plans qui trouvent leur point culminant dans une scène de restaurant avec des crevettes.


Et ce n'est d'ailleurs pas le seul moment où la cuisine sera convoquée, avec notamment cette scène où Elisabeth s'attaque à la préparation de plusieurs plats. Si la prestation de Demi Moore est remarquable dans l'ensemble du film, elle l'est d'autant plus dans cette scène décalé, à la fois amusante et peu ragoûtante, avec là encore des inserts sur une nourriture qui ne fait pas envie et un travail sur les bruitages impeccable.


Le parallèle culinaire n'est d'ailleurs pas si anodin quand on y pense, tant la fameuse substance qui donne son titre au film pourrait être considérée comme l'ingrédient miracle d'une recette permettant de rester éternellement jeune, à conditions de respecter les différentes étapes.


Margaret Qualley dans le film The Substance
Margaret Qualley dans The Substance

Bien évidemment, si tout était respecté à la lettre, il n'y aurait pas d'histoire et même si la qualité esthétique en termes de composition du cadre, que ce soit avec les gros plans ou les plans larges, les jeux de couleurs avec une tendance à la saturation qui va renforcer la froideur de la salle de bain qui devient ici une salle d'expérimentation, il faut bien avouer que l'on attend que le moment où ça va dégénérer.


En effet, Coralie Fargeat prend le temps de mettre tous les éléments en place, faisant monter l'attente peu à peu avec des scènes longues, sans dialogues, qui permettent la contemplation, avec un premier ébahissement devant la séquence de l'activation et de cette (re)naissance dans un nouveau corps qui s'apparente à un mélange entre Alien et le cinéma de David Cronenberg.


Par la suite, même si le rythme sera toujours plutôt du côté d'une certaine lenteur, tout finit par s'accélérer petit à petit dès lors que les règles ne sont pas suivies à la lettre, avec des scènes de plus en plus frappantes et extrêmes, avec une d'ailleurs une intelligence dans la mise en scène qui joue toujours sur cette notion de dualité avec un face à face particulièrement savoureux quoique brutal vers la fin du film où Margaret Qualley et Demi Moore sont toutes les deux excellentes.


Cependant, c'est suite à ce moment que le film commence à partir un peu dans tous les sens, avec troisième acte qui, paradoxalement, va très loin sans aller assez loin. Il est difficile d'en parler sans spoiler mais on passe du body horror au film de monstre. Même si les deux sont extrêmement liés, que les prothèses sont parfaites et que Coralie Fargeat profite de cette bascule pour aller pleinement dans le gore, on regrette finalement que cela ne soit pas encore plus outrancier. Quel dommage que la recette des tripes à la mode de Caen dont il est question plus tôt dans le film ne soit pas prise presque au sens propre dans l'avant-dernière scène, véritable tourbillon de folie sanglant, qui explose les oreilles au passage avec une saturation du son à l'extrême dont on se serait bien passé.


Qui plus est, plusieurs questions restent en suspens à propos de la substance et c'est dommage car au vu des événements du troisième acte, quelques précisions auraient été appréciables sur les effets indésirables ou plutôt les facultés qui peuvent potentiellement être développées grâce à cette fameuse substance. Certes l'objectif du film n'est pas de parler de cette substance, et de dire qu'un tel produit serait dangereux, mais un peu plus de développement sur celle-ci n'aurait pas fait de mal.


Néanmoins, même si l'histoire part dans un grand n'importe quoi finalement assez inoffensif pour la plupart des protagonistes dans la dernière séquence, il n'en reste pas moins que la réflexion sur le vieillissement et cette quête vaine de jeunesse éternelle atteint à ce moment un point culminant, avec une invitation à l'acceptation des corps tels qu'ils sont, sous peine de les détruire en voulant atteindre un idéal fantasmé pour satisfaire autrui au détriment de soi.


Ainsi, malgré quelques manques dans l'histoire, The Substance est un film qui remue, qui fait ressentir de vives émotions et sensations au travers d'une esthétique soignée accompagnée d'une bande originale au leitmotiv entraînant. Coralie Fargeat propose au spectateur une expérience cinématographique forte et s'impose comme une cinéaste emblématique de l'horreur à la française.

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